• 1.4

     

    Il n’avait pas revu sa fille depuis plusieurs semaines quand elle réapparut. Quoiqu’il ne s’inquiétait pas. Sa femme assurant qu’elle recevait régulièrement des SMS. Seulement il tomba des nues quand elle pénétra dans le petit salon de l’appartement. Ne trouvant qu'à se laisser choir sur le canapé de cuir recouvert d’un drap brodé. On y distinguait nettement le Rocher de la Vierge à Biarritz. C’était une belle vue d’ensemble, large et colorée. Sauf qu'un autre drap lui faisait face, comme un message radical, lugubre et menaçant, et celui-ci recouvrait sa fille de la tête aux pieds. Une burqa noire comme la nuit. Un linceul sombre qui sonnait le glas d’une vie de lumière. Son esprit ne chercha pas à biaiser. Il ne s’agissait pas d’une farce ou alors tellement grosse qu’elle était ratée depuis la première seconde. Mais une voix interne lui intima l’ordre de croire ce qu’il voyait. Quant à la voix échappée du linceul, il s’agissait bien de celle de sa fille. Un timbre identique et mort à la fois. Les yeux aussi. Il en reconnut immédiatement les contours. Brodés de sourcils uniques qu’il avait taquinés de ses doigts quand elle était enfant. On ne voyait plus que ses yeux. Rouges sang. La voix avait perdu cette souplesse qui la rendait depuis toujours mélodieuse. Ou alors sous la housse à présent elle s’épuisait. Ce qui était tout à fait plausible. En attendant elle avait à lui parler. Elle était même venue pour ça. D’abord. Je préfère te le dire tout de suite.. J’ai rien à t’expliquer.. Seulement il ne lui avait Encore.. rien demandé. Il remarqua alors ses mains gantées. J’ai pas fini mes études.. C’est pour ça que je viens te voir.. Je vais les reprendre, et la loi me permet de demander une pension à mes parents. Jusqu’à la fin de mes études. C’est la loi. Elle sortit une feuille d’un petit sac noir à cet instant et lui tendit. Il tremblait quand il s’en saisit. Trouvant dessus quelques lignes manuscrites et une série de chiffres suivis de courtes formules explicatives. L’addition des diverses sommes lui parut exorbitante. D’autant que ça l’amenait à réfléchir sur cette histoire d’études. Il devait certainement s’agir des études de pharmacie interrompues trois ans plus tôt. Elle ne s’était jamais montrée spécialement motivée. A défaut d’avoir été acceptée dans le cursus médecine, elle s’était rabattue en pharmacie. Mais c’était juste une roue de secours. D’ailleurs il s’était à peine étonné de la voir sécher ses premiers cours au bout de deux petites années. Il ne prit aucune décision ce jour là. Comment aurait-il pu ? Aucun mot si ce n’est de vagues onomatopées purent quitter sa bouche. Heureusement sa femme déboula plus tôt que d’habitude, et visiblement elle savait mieux que lui de quoi il en retournait. Joachim.. C’est ta fille quand même.. Elle s’exclama en le retrouvant muet. La burqua sans doute le laissait sans voix. Il n’en sut rien de plus dans les minutes qui suivirent. Allant se coucher sans dîner il lui fallut attendre le lendemain pour apprendre que depuis plus d’un mois elle vivait avec un pakistanais dont elle était .. La troisième concubine. Convertie à l’islam ce qui allait de soi. Farouche adepte du salafisme, et violemment anti chrétienne. Qu’elle appelait la fausse religion du démon.. Il lui vint une idée alors. Plutôt une question qu’il rumina longuement. Se demandant comment on pouvait s’imaginer être pharmacienne dans cette tenue. ..


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