• 31 ) Un mauvais téléfilm

    L'amiral Kaissen n’eut pas le cœur d’aller jusqu’au bout du film. Il stoppa la scène juste à l’instant où le militaire afghan levait les bras et tombait à genoux. Trois cadavres en bouillie gisaient à quelques mètres et l’un d’eux était agité d’horribles soubresauts. C’est un signe de l’époque, quoiqu’il arrive dans le monde il y a toujours une caméra, un téléphone qui traine dans le coin, et la mort filmée en direct et sous toutes ses coutures parait à peine plus tragique qu’un mauvais téléfilm. Bien moins photogénique en tout cas, et on ne sait plus s’il faut applaudir ou pleurer à l’instant où des hommes plein de vie crèvent en public tels des moutons. Quoique moderne, cette déconfiture d’un acte aussi sacré n’a rien à envier aux supplices d’autrefois, mais alors on s’arrêtait au moins de mastiquer quand de pauvres diables rendaient l’âme. On se découvrait, on hurlait, on s’écriait, on s’exclamait tels des sauvages. Aujourd’hui on ne pousse même plus le son de la télé si ça vient à l’heure du repas. Au mieux on donne son avis, et au pire on zappe. Seulement une chose ne changera jamais, le degré de souffrance concentrique que provoque la mort d’un être humain. A moins d’un mètre du soldat afghan tombé à genoux juste avant que l’écran devienne noir, se trouvait son propre fils, sanglant, égorgé et criblé de balles. ..

     

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