•  J’avais depuis longtemps défini une procédure. Toute autre attitude serait une folie. J’ai su dès la première minute que le Mystère de l’avènement ne permet aucun laisser-aller, aucune mollesse. Les lois Fondamentales sont coulées dans l’airain, et la plus petite erreur se paie au prix fort, celui d’une sentence implacable sortie du brasier des origines. Le viol de la Loi du Père est un crime dont le châtiment ne fut jamais prévu. La raison en est que les hommes ne peuvent juger ce qui ne leur revient pas. Reprenons. Chaque atome répond d’une histoire qui remonte au Premier Calcul quand la réalité n’était qu’un miroir vide. Aucune conscience ne pouvait encore la mesurer, la définition même du néant. Vint le chaos. Puis advint l’Ordre et le Monde, l’Esprit vivant… Comme un vrai cinglé j’ai laissé s’imprimer l’ombre de ma vie sur ce miroir. Seuls les fous, les sorciers, les grands guerriers, s’amusent dans la vision du paradoxe inhumain. Ils sont des fous, des guerriers, des sorciers.. Pour la grande masse biologique, celle qui s’agite en milliards d’unités fragmentées, qu’est-ce que ça peut faire ?.. les choses sont telles qu’elles sont, et ils ont leurs innombrables soucis et tâches quotidiennes à accomplir. Leurs espoirs génétiques, la croyance inébranlable en un pardon qui va racheter leur nature souillée du gras des excréments. Les hommes souffrent de leur condition charnelle. Ils nourrissent et secrètent la plus grande illusion qui soit, l’espoir, ce sentiment qui du début à la fin parasite leur conscience. Les amène à croire que cette souffrance est d’essence divine et doit les rendre dignes. Ils meurent péniblement en regrettant que ça se termine si vite, comme s’ils pouvaient sincèrement regretter d’avoir accompli leur boulot d’éphémères au service de la Force de Vie…

     

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  • A mon tour je balançais un jeu d’enfer. Gilgamesh n’aurait plus qu’à se fabriquer une épopée toute neuve après ça. Et mon compte était bon pour un samedi soir. 1948 restera pour moi une année de légende, celle où je me retrouvais dans une Ford cabossée comme un vieux char fonçant sur Mexico la dingue et poussiéreuse en compagnie de Jack sur la banquette arrière défoncée, une caisse calamiteuse hurlant et pleurant de toute sa ferraille, Dean au volant suant de la tête aux pieds. Les choses pour être franc se révélaient on ne peut plus simples. Je m’étais mis à trafiquer des Rêves sur nos symboles aux consonances sacrées pour finir à la fin par assouvir des fantasmes aussi pitoyables. Et qui en douterait. Mon âme s’est accroché à un texte et à la chair odorante de Jack Kérouac, ma folie doit tenir compte d’une passion illogique et stupéfiante. J’accepte mon sort, il ne peut en être autrement, ça vaut toujours mieux que de crever en bonne santé une vie entière. L’écriture des destins ne m’a au fond jamais enivré. J’obéis là à une nécessité que je qualifierais de biologique. Dans le sens où les abeilles par exemple se tuent au boulot jusqu’à la mort sans jamais se poser de questions. Moi j’ai une âme de truand, je dois bien avouer. Et rien ne se fera jamais dans les règles. Même si j’ai décroché un rôle en or dans le Jeu, pourquoi devrais-je me laisser griser. Les affaires et le sort du Monde ne me concernent qu’à cinquante pour cent. Rappelons-nous que je suis le Balayeur dans l’histoire. Bien sûr, cela peut paraître un peu compliqué quand on a pas encore l’habitude. Le secret en fait est que les destins s’emboitent les uns dans les autres comme des poupées gigognes. Ils ne fonctionnent aussi que si le jeu est correctement alimenté par des mises qui se valent faute de quoi tout est très vite déséquilibré et se fige, se retrouve gelé, exactement comme un bon vieux logiciel Microsoft. Les images avancent par saccades, le processeur chauffe à mort pour relancer le programme. Ca rame de tous les côtés, et inutile de s’attarder, chacun a connu les affres d’une machine pourrie. Mais ne vous en faites pas. Gardez toujours en tête ce que vous savez de vos ordis, profitez sans complexe de votre expérience de gratteur de sites pornos, et vous verrez, que c’est du velours, tout va baigner. ..

     

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  • Mais dis-moi Alberto.. je ne savais même pas que tu fumais.. Il soupira. Après l’amour, j’aime bien.. comme beaucoup de monde.. ça n’est pas un grand péché, qu’en pense-tu ?.. Tu as raison, sauf, quand il s’agit d’un prêtre, le moindre truc et tout le monde se met à fantasmer.. Il ricana. J’ai un peu l’impression, que tu cherches à confesser quelque vérité mon enfant.. libre à toi, cela ne sortira jamais de cette pièce, sois en sûre.. T’es un malin, elle lui fit en s’esclaffant, avant de tirer une longue bouffée de cigarette.. j’ai entendu des choses.. sur toi.. parler des autres, c’est déjà le sport national des italiens, alors dans ton cas, t’imagines un peu, on te trouve, comment dire, trop masculin pour un simple prêtre ;. Bon, mis à part aussi les vieux croutons.. des eunuques, il ne doit plus en rester beaucoup dans l’église que ça empêche de dormir.. au fond si j’ai bien compris, tout le monde te trouve vachement bien comme prêtre, tu sais t’occuper de ceux qui en ont le plus besoin, les pauvres, les malades, et puis les gens oublient leur solitude en ta présence, ça les occupe et compte autrement plus que ce que tu fais avec ta queue mon bonhomme, les italiens ne sont pas aussi stupides qu’on prétend ;. Sauf.. sauf.. quand ils se mettent à déblatérer sur leur mama.. Daniela éclata de rire et se retournant sur le lit plongé dans la pénombre, lui caressa les lèvres. Il se laissa faire. Au cœur de la nuit leurs corps même douchés exhalaient un parfum de poussière et d’encens. Au bout de quelques minutes d’un silence opiacé (traversé de lointains gémissements en provenance des couloirs de l’hôtel), il brisa l’immobilité. Dans un léger froissement des draps il glissa sa main sous le corps à ses côtés, à nouveau déjà qui frémissait. De ses doigts il la caressait, la faisant haleter, une façon de lui envoyer un signal sexuel. Quand il se fit plus précis elle lui serra très fort la peau d’une cuisse. Attends.. rien ne presse.. elle minauda d’une voix étouffée. .. En tout cas tu as un de ces répondants ;. J’en reviens pas.. elle lui fit plus tard en expirant la fumée d’une ultime cigarette. C’était fort.. elle continua.. aussi fort que ce que tu as ressenti en découvrant la grotte.. il reprit d’une voix douce et neutre. Que veux-tu dire exactement ;. Elle soupira dans le calme à peine entrecoupé de bruits diffus en provenance des étages. C’est à toi de me le dire.. Insista-il de la même voix douce et ferme. Elle avala péniblement puis au bout d’une minute elle revint comme libérée. Je ne voulais pas t’en parler ;. Parce q.. comment l’exprimer ,.. ma conscience a été happée, il y a quelques heures à peine, tout mon corps enveloppée d’un vent chaud, et onctueux.. je ne sais même pas comment décrire une pareille sensation.. et je me sentais bien.. incroyablement bien.. seulement je pensais à toi depuis la nuit dernière, dans le train, cette pensée ne me quittait plus, un désir trouble et dense, je le confesse si c’est ce que tu veux entendre, et à Massabielle j’ai ressentis une certitude qui m’a beaucoup remué.. c’est ta présence.. et ssshh.. de l’énergie en provenance de toi, de ces pensées.. qui me guidaient.. tu dois me prendre pour une folle, non ,.. Il devina qu’elle se tournait vers lui en espérant une réponse. Pas le moins du monde.. j’ai connu quelque chose de semblable il y a plus de dix ans, au même endroit.. néanmoins il n’est pas impossible que ma présence ait pu jouer pour toi aujourd’hui ;. Ce lieu est étrange, il peut marquer plus particulièrement certaines personnes.. et pourquoi ne pas imaginer qu’une connexion s’établit de la même façon entre ceux qui ont alors été désignés.. qu’est-ce que t’en dis ?.. moi comme je viens de te l’avouer, je pensais à toi cet après-midi, en faisais-tu autant ?.. Il ricana. Je ne vais pas te mentir, certainement oui.. mais j’ai déjà accompagné.. d’autres personnes ici-même, sans qu’elles ne profitent ainsi de.. nos échanges de pensées.. Néanmoins. Ressens-tu cette force enveloppante, une chaleur qui ne fait pas monter la température du corps, et qui accorde une liberté à laquelle on n’a jamais rêvé.. Oui.. c’est exactement tel que tu le décris ;. D’ailleurs je viens de te le prouver, m’offrant à tes vices, et je ne m’abandonne pas ainsi d’habitude, crois le ou non ;. Elle souffla au bout d’un moment, l’esprit clair et le cœur embrumé. Quatrième miracle. ..

     

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  • L’audience a du mal à garder son sérieux ; hésite entre ennui et moquerie. Elle ne comprend pas ce qui a pris à quelques responsables de la sécurité américaine de les réunir pour visionner un film de série B hollywoodien aussi obscur. Un peplum des années cinquante censé se dérouler dans l’ancienne Egypte. Les scènes montrent un décor de temples au milieu du désert. On aperçoit deux pyramides au-delà d’un toit de pierres soutenu par une enfilade de gigantesques colonnes de carton plâtre. Puis l’on devine une procession qui débouchant d’une sorte de couloir entre deux temples se dirige vers la place brûlée de soleil au milieu de laquelle se tient la caméra ; c’est un plan fixe. Le film est colorisé, et les teintes hésitent entre le chaud et le criard. La procession se rapproche assez lentement tandis que monte en puissance une musique, sorte de mélopée mâtinée de cuivres, des sons qui rappellent les symphonies classiques du début de vingtième siècle. Enfin la procession se rapproche et effectue un changement de direction à 45 degrés juste avant d’atteindre la caméra. Arrive le pharaon sur un trône porté par vingt esclaves. Un grand noir marche à ses côtés pour le rafraichir au moyen d’un large éventail de plumes multicolores. Suit un cortège de prêtres les mains jointes, se livrant à des incantations. Puis des porteurs d’offrandes, enfin un groupe de très jeunes filles s’avançant deux par deux. Une longue colonne de soldats en armes ferme la marche. Le cortège se dirige vers un édifice inhabituel, une sorte de mausolée surmonté d’un bâti globalement circulaire si ce n’est que sa surface est constituée de plaques anguleuses, sans doute des pierres lisses et recouvertes d’or. L’ensemble constituant un édifice original et distinct parmi toutes les constructions alentours. Les images défilent sur un rythme précis, comme si un mécanisme d’horloge animait les personnages. Et en changeant de cap à quelques mètres de la caméra en plan fixe, la chorégraphie stylisée devient encore plus prenante. Les pas réguliers des marcheurs offrant la curieuse impression d’une longue succession de plans fixes. A présent on aperçoit le début du cortège se dirigeant droit vers le mausolée surmonté de sa calotte anguleuse, un peu semblable à une gemme grossièrement taillée. Et alors que les prêtres deux par deux s’apprêtent à pénétrer dans l’ombre du bâtiment de pierre, d’un mouvement de la main le général Spatt stoppe le film. D’un regard circulaire il observe l’audience, passant de l’un à l’autre, avec un sourire moqueur. Comme si une bonne blague allait lui sauter des lèvres. Pourtant son regard semble figer chacun sur son siège. Cette curieuse fin d’après-midi sur une base militaire de l’Arizona a pour effet de perturber les esprits. Sans que nul parmi les invités ne puisse définir l’origine du malaise. ..

     

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  • Le souffle sortira du haut de la grotte, dans un tourbillon.. et quel endroit magnifique .. bien plus que tout ce que j’avais imaginé. Un décor pareil ne peut être le fait des seuls hommes.. bien trop parfait. D’abord il gèlera les consciences. Puis aussitôt les transparents profiteront de l’ouverture de la valve, ils vont se déployer sur le monde pour combattre les Anges sombres venus préparer le retour de l’armée du Maître.. L’amiral Alan Kaissen est au centre d’un destin reprogrammé, mais le complot qui devait voir un sous-marin tirer un missile équipé d’une bombe nucléaire sur la Mecque a échoué. Il sait que la mort de son fils est une réalité, elle lui a été confirmée par le canal officiel de l’armée, comme il est certain de l’imbrication de faits inouïs dont il est la cible et son fils une victime. Rien n’est joué..

     

    James Carabac cesse d’écrire pris d’une ivresse propre à tous ceux qui à un moment donné ont le sentiment d’échapper aux lois d’airain du réel. Il enlève sa chemise pour se retrouver en teeshirt, et contemple à nouveau le sanctuaire. Le va et vient des pèlerins a un caractère pathétique sous la douceur frémissante de leurs gestes dépourvus de précipitation. Lui-même est bien conscient de l’incongruité à laquelle il s’adonne. Placer en ce lieu de prières et de bontés intra-humaines le détonateur spatial de l’apocalypse. Rien ne colle logiquement. Au fond.. tout est relatif .. Il murmure en se pinçant les lèvres. Il respire amplement tandis qu’une colonne de chariots bleus à trois roues avec en tête un curieux personnage handicapé se déhanchant avec la précision d’une bielle à plein régime. Il les observe alors qu’ils s’installent en demi-cercle, et l’homme au visage dur et pierreux qui à tous les coups doit être le prêtre, forcément il s’en trouve toujours un qui les accompagne, lance un regard de chef de guerre sur sa troupe. A quelques mètres de lui dorlotant un vieil homme à la bouche ouverte et emplie de bave, une jeune gonzesse aux traits sensuels, un rien lascive, exactement comme il les voit dans ses fantasmes. Super.. il fait en souriant aux anges. Puis il se remit à écrire ne cessant de remuer la tête. 

     

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