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    Le chauffeur s’avança pesamment. Sans parvenir à dégager le passage. Alors d’un mouvement sec il leva l’arme au plafond et fit feu. Lambart partit en arrière comme si on venait de l’y pousser. Il écarta ses bras pour obliger les infirmiers à reculer.

    - .. Du calme.. Du calme.. Wilfried… Je Vous en Supplie..

     

     - .. Ca ne tient qu’à vous..


    Ragea froidement le chauffeur en reprenant sa marche en avant. Les dents serrées et de la bave aux commissures. Grognant il forçat le barrage. Appuyant compulsivement l’arme sur sa tempe. Sans un mot il rejoignit le véhicule et s’y engouffra. Faisant repartir le moteur d’un seul coup de clé. Seulement le minivan lui bloquait la sortie. Du regard il chercha Lambart qui venait de disparaître. Comme fondu dans le décor. Il ne restait que les trois gorilles se déployant autour de la Mercedes. Il verrouilla aussitôt les portières et enclencha la marche arrière. Serrant les doigts sur le volant gainé de cuir, appuyant à fond sur l’accélérateur. L’engin bondit sur le minivan qu’il enfonça de tout son poids. Le repoussant de plusieurs mètres dans un déchirement de tôles. Les hurlements des trois gros bras et une pluie de graviers. Repartant aussitôt dans l’autre sens. L’accélérateur au plancher et les roues qui creusaient le sol. Du shrapnel balayait les trois types qui tentaient de le rattraper. L’un d’eux avait fini par s’accrocher à la poignée de porte et glissait de tout son long. Il se retrouva contre un muret avec les genoux en sang. Il jura et se mit à geindre. Tandis que Roger Wilfried parvenait au bout de l’allée. Il immobilisa sèchement la limousine et chercha à nouveau Lambart dans ses rétroviseurs. Il aperçut juste un des infirmiers qui rappliquait armé d’un long tube d’acier. Il ferma les yeux et respira très fort. Puis fonça sur le portail de fer qui claqua en s’ouvrant, le fracassant dans un bruit de tonnerre. Dérisoire sous l’assaut du gros pare-choc chromé. Il manqua à cet instant de percuter un bus venant sur sa droite. Il l’évita au milieu des cris de passagers et s’enfuit sous un concert d’avertisseurs. Des automobilistes de part et d’autre le maudissaient et le traitaient de fou. Un kilomètre plus loin il se calma enfin, respirant un air qui lui parut à nouveau âcre. Inexplicablement âcre. Un rapide coup d’œil au tableau de bord lui permit de constater qu’il restait à peu près la moitié du plein. De quoi effectuer quelques centaines de kilomètres. Il prit alors la direction de l’océan. Sur une simple intuition. Il n’avait rien prémédité à partir de là. Tout au plus son esprit reconstituait de larges morceaux du puzzle. Mais il manquait le plus crucial, ce qui relevait directement des interventions extérieures. Seul Lambart était en mesure d’éclairer le mystère. De dénouer l’énigme. Le professeur conservait toujours ce pouvoir. Néanmoins il avait perdu le contrôle des évènements. Un échec qui le rendait fou de peur comme avait pu constater Wilfried. C’était une évidence. Une constatation à partir de laquelle il était certain d’avoir rapidement des nouvelles de l’homme. Il emprunta le premier accès autoroutier et parcourut encore une vingtaine de kilomètres. Ruminant un plan d’action avant de s‘arrêter sur une aire de station service . Il voulait simplement prendre un café et se rendre aux toilettes. Il se passa une main sur le visage qui lui parut collant de sueur ou d’autre chose. Presque gluant. Il ne supportait pas cette sensation qu’il était pressé de voir disparaître à grande eau. En quittant la limousine il ne put que constater les dégâts. L’arrière enfoncé. Eraflée et cognée de partout. Ce n’était plus qu’un engin informe. Une vieille machine gémissante. Il lui caressa une aile et s’éloigna tristement. C’est au retour. A peine avait-il repris la route que le téléphone du bord se manifestait.

     

    - .. Il faut que nous parlions monsieur Wilfried… vous faites partie de cette histoire, et ça ne sert à rien de fuir devant la réalité… Elle vous rattrape toujours.. Même en enfer s’il le faut.. Je peux vous aider à comprendre;. Mais vous devrez faire un gros effort;. Un sacrifice monsieur Wilfried.. Vous entendez ?.. Alors peut-être vous accepterez la réalité.. Telle Qu’elle Est..


     

     


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    Le docteur ricana comme s’il venait de toucher un brelan d’as. Il n’était plus question pour lui de subir les évènements. Il avait repris la main.

    - Ca ne vous avancera à rien de tout savoir.. Vous êtes le seul Et Unique.. Roger Wilfried… Que croyez-vous.. Qu’il suffit de forcer le destin pour être quelqu’un d’autre ?.. Vous faites fausse route monsieur Wilfried.. Je vous conseille d’être plus coopératif à partir de maintenant..

    Le chauffeur comprit très vite ce qui redonnait une pareille assurance à Lambart. Trois types baraqués se dessinaient dans le jour. Sans doute sortis du mini-van stationné derrière la Mercedes. La bloquant ainsi sur place.

    - Vous allez avancer gentiment Wilfried;. Et suivre nos amis qui sont là derrière.. Vous devez vous reposer.. Ça s’était toujours très bien passé entre nous jusque là;. N’est-ce pas ?.. Alors qu’est-ce qui nous empêcherait de redevenir bons amis ?.. Vous comprenez Wilfried ?..

    Ce dernier observait la scène sans répondre. Les paroles de Lambart venaient de le conforter dans ses déductions. Pour des raison encore mal définies ils rechignaient à utiliser la force brute. Comme s'il était intouchable, ou impossible à éliminer. Cependant il crut reconnaître un des costauds de l’arrière plan. L’homme travaillait comme infirmier à la clinique du professeur. Il repéra aussi la trousse qu’il tenait en main. Devinant le genre d’attirail qu’elle pouvait contenir. Une seringue avec un bon anesthésiant à coup sûr. Se disant aussi que le professeur n’allait plus se fier à une modeste Spectoranine pour le garder sous contrôle. Il pouvait tout craindre à partir de là. Y compris de se retrouver paralysé sur un lit d’hôpital et dans une chambre blindée fermée à double tour. Cette idée lui sembla même très réaliste.

    - Je suis votre ami … depuis dix ans .. Je vous ai toujours aidé.. Soutenu dans les moments les plus difficiles .. C’est pas vrai monsieur Wilfried ?..

    - Non professeur.. Je vais remonter dans la voiture;. Partir d’ici.. Et on discutera plus tard….

    Lambart souffla longuement.

    - Pffffft.. Je suis votre ami monsieur Wilfried(lui redonnant du Monsieur..).. Mais soyez raisonnable, vous comprenez ?;. Plus tard je vous expliquerais et vous serez d’accord avec moi.. Alors venez.. Avancez gentiment, je vous en prie..

    Wilfried perçut un mouvement simultané chez les trois costauds. Instinctivement il recula dans la pièce baignée de lueur pailletée. Puis soudain il plongea sa main droite dans la poche de sa veste, et en ressortit l’automatique.

    - N’avancez pas;.. N’essayez surtout pas de me toucher…

    Il s’écria d’une voix rauque. Les observant qui à pas lents s'approchaient. Leurs corps pesants s’élevaient comme une muraille pour ne lui laisser aucune chance.

    - Vous faites n’importe quoi;. Monsieur Wilfried.. Nous sommes quatre.. Vous allez pas nous tuer tous les quatre tout de même.. C’est toute une vie enfermée qui vous attend.. Décidément vous perdez la raison… vous me décevez..

    - Non monsieur le professeur.. Je ne vais pas vous tirer dessus.. Pas sur VOUS…. C’est moi que je vais tuer si vous me laissez pas sortir libre d’ici;..

    Il venait de poser le canon de l’arme sur sa tempe. Son visage déjà blanc devint sinistre, baigné de la lumière orange et traversé de flèches stroboscopiques. Lambart laissa tomber ses bras le long du corps.

     

    - Faites pas ça…. Vous avez pas idée du Crime.. Que vous pouvez commettre…

     

     A nouveau il était à deux doigts de s'effondrer.

     

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    A lintérieur il lui fallut rapidement saccoutumer à la lumière. Découvrant que les vitraux étaient repeints de noir. Titubant dabord et en manque déquilibre. Enfin il se retrouva à flotter dans un nuage phosphorescent. Une brume pailletée qui ne lui paraissait pas bleue comme avait cru le coursier. A moins quelle ne se transforma la nuit. Celle-ci était plutôt jaune orange et sa particularité tenait au fait quon en percevait pas la source. Cétait une longue pièce qui ressemblait tout juste à un grand garage. Sauf que vers le fond une batterie de machines électroniques renvoyaient le décor au rayon de la science fiction. Les écrans et des oscillateurs lumineux laissaient penser quun haut niveau scientifique était nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de lensemble. Dautant quune espèce de chaloupe spatiale se trouvait à proximité immédiate et dans laquelle en sapprochant Roger Wilfried devina une forme humaine. Il sefforça de maîtriser les battements de son cœur qui avait manqué de semballer. Découvrant quil y voyait très clair à présent que sa vue sétait habituée. La Forme.. Manifestement était celle dun être humain. Mais dans un état épouvantable. Entièrement nu et dune couleur sombre. A croire quun lance flamme lavait carbonisé sur tout le côté droit du corps y incluant par mégarde la tête dans sa totalité. La « chose » quoique immobile était vivante. De légers spasmes lagitaient par intermittence au travers desquels on devinait le travail des machines. Dune pompe aussi dont le reflet se lisait en lignes bleues sur lécran. Tout portait à croire dans la régularité parfaite du cycle lumineux que ce corps nétait après tout quune des pièces extérieures de lappareil. Roger Wilfried en eut le souffle coupé avant de se ressaisir. Il sapprocha encore et aperçut le bras gauche nu de La Forme. Presque intact. Il le prit délicatement dans sa main, le cœur au ralenti. Le trouvant tiède et plus surprenant encore, très doux. Puis il observa quelques secondes le cobra tatoué sur lavant bras. Un beau dessin fin et artistique. Le reposant délicatement il ferma une seconde les yeux. En se retournant il aperçut Lambard qui rouvrait les battants. Quil bloquait aussitôt par un système mécanique avant de se redresser sur le seuil.


    - Cest donc lui le vrai Roger Wilfried ?.. Et moi qui suis-je monsieur Lambard ?.. Vous allez bien être obligé de me répondre ..


     


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