• L'univers subit la violence inouïe des deux forces contradictoires. L'une cherche à le dilater sans fin, pousse tout ce qu'elle peut comme une bombe qui n'en finira jamais de péter. L'autre n'a qu'un seul objectif, recomprimer le tout jusqu'à le réduire à rien. Ramener toute chose au vide. Nettoyer la maison de Dieu de toute poussière, insecte, parasites et résidus énergétiques. Débarrasser l'éternité de ces horribles incongruités, les éléments pourrissants du temps, semble être la raison d'être du mystérieux malheur qui accable les choses vivantes. Rien n'échappe aux deux forces contraires. L'ennemi, la femme, l'homme, le mauvais, la beauté, s'épuisent dans le combat. Du haut de la montagne je les vois tomber comme des mouches. S'il fait chaud je m'ouvre une cannette bien fraîche et assis benoîtement sur une souche large et solide, je me dis qu'ils en bavent ceux d'en bas. Les pauvres. L'affaire parait tellement bien réglée que tout finit par passer comme par enchantement. Ca avance dans la fourmilière quoique j'en pense. Qui aurait une minute à perdre pour réfléchir sérieusement à ces problèmes. Entre la période des voeux et le solstice d'hiver l'humanité avance au rythme du temps qui l'écrase de toute sa splendeur. Sans se gêner. Pour en revenir à l'ambiguïté de la marche en avant. Nous constatons que le monde s'est transformé en un petit village de rien du tout, surpeuplé certainement, mais d'un ennui à crever si on a eu la malchance de tomber à cette époque que je qualifie de tristement intermédiaire. Bien sûr le plus gros s'est fait en douce, rapido, histoire d'éviter la panique. Au moins dans un premier temps. De la Russie, l'Asie, l'Afrique, la maigre Europe, et l'Amérique le berceau de la vraie nation du futur encore en vie dans mille ans, il ne reste déjà que des lambeaux. J'ai qu'à allumer la télé et je vois de mes yeux, à l'oeuvre, le dernier couturier de costumes folkloriques de la république de Dracustan, à droite à côté de la Russie, juste avant d'entrer en Kashmir Indien. Sans me déplacer je sais que sa femme a des vers au cul et que c'est dû certainement à une mauvaise alimentation à base d'hamburgers frelatés dont les points de vente ont poussé comme des champignons dans la région. Ils sont tous de la même marque reconnaissable aux tons verts et rouges des devantures. J'en suis désolé( pour la femme du couturier), mais cette histoire ajoutée à pas mal d'autres suffit à me couper l'envie de me déguiser en touriste. Et continuant ainsi, de gâcher mon enthousiasme à rencontrer les spécimens communs de la joyeuse société moderne. Me taper dix mille kilomètres pour vérifier, de visu, l'état sanitaire de la population, ne m'enchante guère. A ce train il m'aurait manqué une petite centaine d‘années, deux cent, peut-être trois cent ans, pour passer véritablement à une étape intéressante. Trop tard pour marcher sur une terre de qualité. D'une âme sans aucun goût pour le dépaysement sous cellophane. Trop tôt malheureusement, que c'est dur à admettre, de s'offrir un ticket pour par exemple, le système Priton. Il faut passer à gauche de la Grande Ourse et continuer tout droit sur un peu plus de dix milles quatre cent années lumières. Ne m'ayant pas senti comme les meilleurs de vocation pour la sainteté je n'ai pas eu la patience d'attendre. Ce qui eut pour résultat de m'amener au seuil de la mort. Heureusement je feinte maintenant. Ma peau, fameux sac d'os et de viande, ne m'encombre plus. C'est toujours ça de moins à transporter sur la route. Un fils d'occident et du vieil orient à la fois, je sais ce qui est écrit dans mon code génétique, n'a pas à s'avouer vaincu. Je marche sur l'eau si je veux, comme mon vieux voisin Le Christ. Mais j'ai passé l'âge de ces enfantillages. Quand je pars faire un tour sur la frontière c'est toujours avec une idée valable derrière la tête.


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  • Depuis longtemps je suis frappé par une incohérence entre les rythmes naturels et les fractionnements de toute sorte imaginés par les uns et les autres à travers le monde. Prenons le dimanche puisque nous y sommes. Jour du repos. Est-ce qu'on passe moins de vie à trépas qu'un autre jour. Absolument pas. Pas plus qu'un autre jour de la semaine ne semble dévolu aux naissances par exemple. Quelle est alors cette force qui pousse les humains à ordonner toutes choses comme ils peuvent. Dans le cas du dimanche on sait bien d'où ça vient. Mais pour ceux qui ont préféré le vendredi ou le samedi c'est la même tentative. Toute aussi vaine. Ce qui est frappant dans tout ça est l'incroyable difficulté de comprendre tout simplement ce que nous faisons ici. On nage en plein mystère comme on dit dans les films policiers. Moi je m'emmerde le dimanche, même si je sais bien que c'est le prétexte le plus royal qui me soit offert pour faire preuve de mon immense flegme. Mais en toute discrétion. On retrouve là encore une fois la lutte entre la connaissance et l'obscurité. L'obsession du guerrier qui s'est juré de juré de passer à travers l'écran noir, par tous les moyens, et la limace terrestre de type commune (brune avec deux courtes antennes et mesurant une dizaine de centimètres..) qui est toute contente que c'est dimanche parce qu'elle pourra s'allonger grassement et en toute impunité sur un fauteuil du salon. On constate en passant que quel que soit le sujet on retrouve deux antagonismes. Nuit et jour. Blanc et noir. Mal et bien.. etc.. Sauf que la ligne de front pour le coup passe directement dans la tête de celui qui se demande ce qu'il va bien pouvoir foutre ce dimanche. On comprend mieux que la création du jour de repos n'est pas un fait si anodin que ça. L'humain est prêt à tout pour aller jusqu'au bout de son calvaire avec un minimum de souffrance. Jusqu'à bénir sans raison un intervalle de temps délimité par une rotation complète de la Terre sur son axe. Sans se poser de questions.

    Dormez en paix mon père, car nous qui sommes éveillés bouillons dans les chaudrons de l'horreur... Henry MILLER (de mémoire..)


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  • Ma vallée prit des reflets bleus ce soir là. Je fixais les cimes encore enneigées pour certaines, où s'accrochaient des filaments de nuage, aussi doux et légers qu'un souffle d'ange. J'étais dehors sous le porche de bois gris, à humer la nuit bleue qui tombait doucement, et mains dans les poches, je bravais le froid sec que j'aimais. Je fermais les yeux et respirais lentement. L'air était pur, sans aucune trace de benzol ou d'ammoniac, si pur qu'il prenait un goût particulier que je me mis en tête de nommer. Après plusieurs essais peu satisfaisants, je décrétais que l'air de ma vallée sentait le vide absolu, comme un petit aperçu, de ce que nous pourrions déguster une fois débarrassé pour de bon de la puanteur humaine.


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  • Pour le Journal ordonné et en temps réel;   http://walter-antogn.skyblog.com

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  • L'expérience avait été préparé et mené dans un laboratoire universitaire américain. Tout était parti (d'après le peu qui nous est parvenu..) d'une batterie de mesures d'éléments quantiques. Comme chacun le sait, le propre de cette théorie repose sur le fait que l'observateur exerce une influence sur les résultats de ses mesures. Ce qui signifie que les éléments des outils d'observation et l'observateur lui-même, à l'échelle quantique, participent à la mesure. Baignent dans un bain unique qui est celui des composants premiers de toutes choses, et peut-être même du vide. Même si actuellement l'existence de particules (comment appeler des "choses" invérifiables..) du vide n'est encore qu'une supposition, une vue de l'esprit. Néanmoins, je crois personnellement à la réalité des gravitons, ou d'une substance qui y ressemblerait. Reprenons l'hypothèse du Big Bang, qui fait tout partir d'une explosion. Une masse indéterminée de matière de la taille d'une orange.. d'un ballon de foot;. d'un grain de riz.. évidemment toute ressemblance avec un objet du réel est dépourvue de sens. Ce minuscule point de matière fragmentée à l'infini et propulsée dans le vide constitue la seule et unique charpente de la réalité. La stabilité absolue des lois qui régissent la matière devient ainsi l'unique garantie de l'esprit humain. Toute fluctuation de ces forces en question verrait immanquablement l'humanité tout entière sombrer dans la folie. Nous sommes le résultat de cette bouffée d'énergie. Les témoins vivants de la réalité. Sans cette interface il n'y aurait rien, pas plus de planètes que de montagnes, d'arbres, de bagnoles que d'êtres vivants. Pour en revenir à ce qui s'est passé dans ce laboratoire. Une nouvelle technique inspiré de la fission nucléaire a été tenté. Mais l'échelle de travail était si réduite que toute espèce de danger paraissait définitivement écarté. Un peu comme si on voulait mesurer la puissance de la nitroglycérine à partir de micro gouttes en éprouvette. Seulement il reste un facteur que les savants évaluent mal encore, et qui leur joue parfois de sacrés tours de cochon. Ce paramètre est inhérent à la nature humaine. Qu'ils le veuillent ou pas les plus grands physiciens ne peuvent s'abstraire totalement d'une forme de représentation du réel qui est celui de la dimension des objets. Ils ont beau savoir, en dessous d'une certaine taille, un quelconque objet semble perdre tout caractère menaçant. D'autant que dans le cadre de travail en question, la nature de l'expérience portait sur des particules uniques et parfaitement isolées. Ce qui est déjà un remarquable tour de force technologique. Néanmoins trois techniciens ont disparu autour de ce que je prend personnellement le risque d'appeler une nano-centrale. (Mais que l'on m'épargne toute forme de procès concernant l'utilisation des mots, ce ne serait que peine et temps perdu..). Seulement la disparition de trois individus n'est pas le plus grave. Le temps s'est arrêté sur l'ensemble de la planète durant un intervalle que l'on évalue à un peu moins de trois minutes. Et on ne sait absolument pas ce qui s'est passé durant cette période


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